Le télétravail deviendra-t-il la norme post-COVID-19 ?

Juil 9, 2020 | Latest, Workplace | 0 commentaires

Imposé par les circonstances, le télétravail s’apprend. Et, surtout, se gère. Mirabel Hoys, Director HR Consulting, Attentia, avance différentes pistes de réflexion.

Le télétravail, nouvelle norme ? Si nombre d’employés ne veulent pas revenir au bureau, c’est peut-être qu’ils n’y sont pas heureux. D’où l’urgence d’un dialogue social pour tirer des leçons collectives pour l’organisation du travail. En même temps, tous ceux qui ont travaillé depuis leur domicile sont aussi lucides sur les inconvénients du télétravail : isolement des collègues, outils informatiques pas toujours adaptés, coûts de connexion internet, intrusion dans la vie familiale et personnelle, augmentation de l’absentéisme à cause de l’ergonomie du home office. Bref, les limites du télétravail sont bien identifiées. «Les conf-call en mode Teams ou Zoom, c’est bien, mais ça ne remplacera jamais les discussions spontanées autour de la machine à café ou les déjeuners informels entre collègues», illustre Mirabel Hoys, Director HR Consulting, Attentia.

Pour les entreprises, c’est un défi de plus à relever. En somme, apprendre à mixer créativité et convivialité au bureau avec productivité et liberté à distance. Une chose est certaine : on ne reviendra pas en arrière. Il faudra trouver le bon équilibre entre vie perso et vie au boulot et adapter les organisations, les outils et les pratiques managériales à ce qui va rester comme la nouvelle normalité de l’après crise sanitaire. Question : le télétravail deviendra-t-il la norme post-COVID-19 ?

Plus on avance dans le digital, plus l’humain devient prépondérant !

«Pour limiter les risques psycho-sociaux, le télétravail doit être volontaire et d’une durée raisonnable, deux à trois jours par semaine maximum», prévient Mirabel Hoys. Il doit également être anticipé et encadré. Et les managers formés. Deux situations peuvent rapidement faire basculer en zone rouge : le télétravail sans la confiance de sa hiérarchie et devoir conjuguer travail et parentalité, voire travail et solitude. «Si on ne va jamais au bureau, on peut se sentir déconnecté, rater des informations, celles par exemple qui ne sont pas écrites mais qui circulent dans les couloirs, comme des opportunités de promotion, etc.» 

Bref, le télétravail ne s’improvise pas. Il ne s’agit pas seulement de maîtriser les outils. La façon de manager à distance est très différente, assure Mirabel Hoys, qui évoque sa propre expérience. «Il faut une discipline personnelle, fixer des règles et faire beaucoup de pédagogie au quotidien. Toujours être collectif, même dans les plus petites structures. Au risque, sinon, de créer des frustrations. Plus on avance dans le digital, plus l’humain devient prépondérant !»

La difficulté de trouver l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle est un terreau favorable au burn out. Et c’est là tout le danger. On s’aperçoit que quand bien même l’employeur a instauré un guide de bonne pratique sur la déconnexion, les collaborateurs -le plus souvent des cadres- n’arrivent pas à se déconnecter totalement… «Si un message arrive à 07:30, cela ne signifie pas qu’il soit nécessaire d’y répondre tout de suite. Or, dans bien des organisations, il y a un risque de voir une surenchère à celui qui répond le premier. On ne parle plus de flexibilité, mais de contrainte. Un encadrement s’impose. Perso, rien avant 08:00 et pas de réunion sur le temps de midi. Il faut savoir déconnecter.»

Le télétravail, nouvelle normalité…

Et comme l’humain est le plus important, le maître-mot est communiquer. L’instabilité et le changement sont vecteurs de stress, rappelle Mirabel Hoys. «On l’a bien senti dès la mi-mars alors que, globalement, nos entreprises auraient pu développer le télétravail depuis bien longtemps… En clair, assurer une communication régulière avec les managers et les collaborateurs sur l’activité. Et s’intéresser à chacun. Ce qui est une base du management est d’autant plus vrai aujourd’hui. Et puis, il faut garder en tête les risques d’un nouveau confinement. C’est aussi cela la nouvelle normalité !»

Pour le cadre, il s’agit de rester vigilant aux contraintes personnelles et à l’environnement de manière individualisée, même si c’est chronophage. «Un jeune homme marathonien qui vit seul en studio n’est pas exposé aux mêmes risques qu’une quadra mère de deux jeunes enfants. Or, ces deux situations sont à risque. Isolement et pratiques addictives pour le premier; charge mentale décuplée pour la seconde. Prendre en compte ces spécificités permet ensuite d’orienter vers les meilleures solutions de rebond», souligne Mirabel Hoys, qui recommande à la fois d’identifier les personnes à risques élevés, mais aussi les collaborateurs ‘ressources’ moins exposés sur lesquels leurs collègues peuvent davantage s’appuyer sur certains projets ou tâches. 

Un oeil sur la communication non-verbale…

Pour ce faire, il n’existe qu’une solution : rester en lien permanent avec les membres de son équipe, presque davantage que d’habitude. Echanger régulièrement permet à la fois de rassurer l’autre, mais aussi de dédramatiser certaines situations. Cela peut passer par des points téléphoniques, même brefs, des réunions d’équipe sur le format questions/réponses, des séances de retours d’expérience. «Le premier geste barrière pour prévenir les risques psychosociaux, c’est de prendre des nouvelles, insiste Mirabel Hoys. Les visioconférences permettent notamment de garder un oeil sur la communication non-verbale des membres d’une équipe, qui peut en dire beaucoup sur l’état d’esprit. Instaurer de nouveaux rituels permet aussi de renforcer le collectif. Avec mon équipe, je consacre cinq à sept minutes au cours de chaque réunion pour prendre des nouvelles de manière plus informelle -les enfants, le chat, etc.» 

Ces échanges quotidiens représentent aussi une opportunité précieuse de détecter les salariés en difficulté. Plusieurs signaux faibles peuvent alerter tels que des oublis répétés, une agressivité accrue, une perte de discernement, des horaires de travail atypiques, une désorganisation inhabituelle, une hypersensibilité, des troubles du sommeil, voire des douleurs musculaires…

Clarifier les règles

De même, l’entreprise ne doit pas sous-estimer les dangers de l’isolement des managers, tout aussi réel. Au quotidien, la gestion du travail à distance nécessite de se concentrer sur les résultats, et non plus principalement sur le comportement des collaborateurs. Au lieu d’évaluer les performances uniquement en fonction de ce que l’on perçoit comme étant le travail d’un collaborateur, il convient de tenir compte de leurs résultats ou d’autres éléments livrables. Et établir un environnement de confiance mutuelle. Confiance, un autre mot tout aussi important que communiquer.

Cette confiance ne s’instaurera que si les règles du jeu auront été clairement définies. «Précisez ce que vous attendez de chacun en termes de contenu de mission et de comportement, mentionne Mirabel Hoys. Le management à distance demande plus de structuration, plus de préparation. Huit heures derrière un écran c’est bien plus fatiguant que huit heures au bureau !»

Conseils pratiques

Concevez des objectifs collectifs forts, propose encore la spécialiste d’Attentia. Le partage d’objectifs et de livrables est un levier de cohésion. Chacun doit connaître sa contribution à la réalisation finale. Fixez des étapes intermédiaires : découpez les livrables ou objectifs sur des périodes plus courtes que vous ne le feriez habituellement. Ajoutez une dose de réel dans le virtuel : organisez des rencontres physiques réelles régulières entre les membres de votre équipe. Bâtissez un solide système de suivi des performances, élaborez des outils de reporting et tableaux de bord efficaces. Ces instruments, mis à disposition des collaborateurs, les aideront dans le pilotage de leur activité. Ce sont là autant d’outils précieux pour manager la performance de l’équipe. 

Enfin, apportez un soutien renforcé à ceux qui ont en besoin. Vous devez adopter un management à géométrie variable. Certains ont besoin de beaucoup de feedback, d’autres préfèrent plus de distance. 

Que chacun se sente à l’aise

«Voilà des années que je prône le télétravail. Avec le confinement, il s’est imposé de façon brutale et sans préparation. Et malgré tout, force est de constater que ça fonctionne !», note encore Mirabel Hoys. Ce télétravail ‘forcé’ va contribuer à briser les résistances qui existaient dans les organisations. Il va favoriser la désertification des bureaux. «La plus grande barrière, la résistance à sa généralisation quand il est possible bien sûr, vient des managers. Il faut un vrai changement dans la culture de l’organisation ou de l’entreprise, dans la façon de superviser… Certains managers se basent sur la présence, le nombre de sièges occupés dans un bureau, mais le seul fait d’être là n’est pas un critère pour mesurer des résultats. Il faut abandonner la politique du présentéisme. Et être très clair sur les objectifs et la mesure des résultats

«Il y a aussi des gens qui sont plus autonomes, qui s’adaptent très bien à travailler à distance et sont mêmes plus performants. La clé est la flexibilité, que chacun se sente à l’aise et dans les meilleures conditions pour effectuer les tâches assignées», conclut Mirabel Hoys.

 

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