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Club Med, des G.O. et des Data !

Jan 9, 2023 | Data Intelligence | 0 commentaires

Au pire de la crise sanitaire, en 2021, Club Med repensait sa stratégie Data. Objectif : repartir à la conquête du marché au départ d’une Data Factory fonctionnant en temps réel.  Entretemps, l’IA s’est invitée.

Une Data Factory pour mieux comprendre la Customer Lifetime Value, soit l’investissement consenti sur chaque client, et le « payback » pour chaque client dans le cycle de vente. Club Med repense sa stratégie data.

Le projet -nom de code « Road 45 »- est initié en 2021, alors que, au pis de la crise sanitaire, les 70 villages sont fermés, qu’il faut gérer les annulations… et le départ des talents IT. De fait, tous les projets informatiques sont à l’arrêt. Le moment est délicat.

Un nouveau Chief Data Officer est recruté, Siddhartha Chatterjee. L’enjeu tient du défi. L’investissement -de l’ordre de 8 millions EUR- est majeur pour Club Med. L’ambition ? Augmenter les ventes de 3 % au départ d’une meilleure compréhension et personnalisation des offres, une meilleure rétention des clients aussi.

Road 45, la transformation Data du Club Med

Si l’entreprise collecte déjà énormément de données dans son Data Lake porté par Google Cloud Platform, beaucoup reste à faire. Club Med vise le temps réel. Chaque information doit pouvoir être gérée au plus vite du fait qu’elle peut impacter le business.

Le projet de Data Factory est confié à Octo Technology. Le premier semestre 2022 est consacré à la création du socle de celle-ci. Historiquement, l’activité de l’entreprise repose sur une base de données relationnelle IBM DB2 sur site. Le DBMS porte l’ensemble des informations clients, y compris sur les agences et, surtout, les réservations. Toutes ces données sont mises à jour en temps réel tant par les utilisateurs internes que par les agences.

L’idée ? Récupérer chaque événement dès qu’il survient dans la base de données et charger les données sur Google Cloud Platform via Kafka. Les données sont envoyées en temps réel à la fois sur une base de données PostgreSQL et sur Big Query pour pouvoir les manipuler librement par la suite. Tout événement sur DB2 est répliqué sur GCP et une gestion des erreurs est mise en place, de même que toute modification d’une table DB2.

A terme, données HR et paiements

D’autres interconnexions sont mises en place, notamment avec le service de téléphonie Cloud Verizon, ainsi que les données produites avec toutes les informations relatives aux villages, stockées dans le PIM Quable. Club Med tire bien évidemment parti des connecteurs GCP pour Google Analytics. A terme, l’entreprise souhaite implémenter d’autres données qui ne le sont pas encore. Il est question des données HR issues de Workday, ainsi que des informations liées aux paiements.

Une fois ces données chargées dans GCP sous forme de Raw Data (données brutes), celles-ci sont retravaillées, vérifiées. Le service Data réalise cette montée en qualité des données afin de les mettre à disposition des utilisateurs finaux, soit au moyen des outils de Self BI et DataViz de QlikView, soit au travers des modèles de Machine Learning conçus par les Data Scientists. L’équipe projet a fait le choix du catalogue de données Zeenea afin de répertorier l’ensemble de ses sources de données et des règles de gestion qui s’y appliquent. La solution fournit notamment un Data Lineage de chaque indicateur pour comprendre de quelles sources de données il provient.

Club Med, 2 milliards d’informations

Fin juin 2022, l’alimentation de la Data Factory était initiée. 2 milliards d’informations existantes sont alors chargées sur GCP, soit 75 To de données. Tous les jours, ce sont 5 millions de nouvelles données qui alimentent cette infrastructure en temps réel, des données issues de 12 domaines différents, dont le CRM, les interactions, les réservations, les activités produits, réseau, les appels téléphoniques, etc.

Pour le Club Med, les données de réservation sont capitales. Afficher les réservations en temps réel est important. Aujourd’hui, la Data Factory permet d’afficher l’ensemble des réservations. C’est un indicateur de premier plan pour la direction, pour les pays, voire les agences indépendantes.

Le deuxième semestre 2022 a vu la plateforme s’ouvrir aux utilisateurs finaux. La fonction de Self-BI est ouverte aux utilisateurs avec la solution QlikView. Elle permet aux utilisateurs de réaliser leurs analyses de données. Celle-ci basculera à terme sur Microsoft PowerBI. En parallèle, l’autonomie des Business Units vis-à-vis de la Data est renforcée avec la mise en place de la solution Dataform qui permet à tous les utilisateurs de réaliser des requêtes sur Big Query et de créer des tableaux de bord avec Looker Studio.

Une première application pilote d’IA a été lancée sur la personnalisation en temps réel du site Web Club Med. L’idée ? Délivrer en temps réel une information de prédiction sur le profil de la personne qui se connecte au site et afficher un contenu adapté sur la home page. Que le client soit connu ou pas, Club Med souhaite pouvoir déterminer rapidement un score en fonction de son comportement sur le site. Le temps de latence souhaité ne devait pas dépasser 200 ms ; il s’est rapidement avéré autour des 50 ms. 

Redonner la propriété des données aux personnes qui la gèrent

Outre la création de la structure Data Factory et de la modernisation de l’infrastructure Data, un gros effort est réalisé quant à la gouvernance de la donnée. L’objectif est de redonner la propriété des données aux personnes qui gèrent cette Data au quotidien.

Cinq grands cas d’usage ont été identifiés, avec une personnalisation encore accrue du site Web, la mise en place d’un scoring de la prédiction d’achat, un travail sur les volets attribution et contribution et un cas d’usage sur l’analyse des appels téléphoniques entrants. Enfin, Club Med veut exploiter la connexion entre GCP et la Google Marketing Platform afin d’optimiser les achats médias, notamment ne plus pousser des publicités ou une promotion vers un client dont on sait qu’il a déjà réalisé un achat en agence, offline donc.

Aujourd’hui, entre 80 et 90% des données stratégiques (CRM, réservations, centres d’appels…) sont collectées en temps réel. En quelques mois, le système d’information est passé d’une architecture monolithique vers un modèle modulaire. Mieux : les métiers sont autonomes sur la consommation des données. A cette plateforme s’est ajoutée une organisation adaptée pour en permettre l’exploitation. Le CDO a d’emblée misé sur une organisation fédérale, agile et pilotée avec des méthodologies type OKR (Objectives Key Results). 

Quatre équipes autonomes

Les missions de la direction Data se répartissent entre quatre équipes : data factory & innovation, self-service & DataOps (ex-BI), ML & IA, adoption. Cette dernière équipe dédiée à l’adoption constitue une nouveauté au sein de Club Med. Elle collabore avec la direction technologique (DevOps) et les trois autres pôles data à l’adoption des solutions et algorithmes par les métiers. En plus de la constitution de cette entité centrale, Siddhartha Chatterjee indique que les effectifs des organisations régionales, les BU du Club Med, ont aussi été renforcés.

Des équipes Data sont actives localement. Sur la gouvernance, l’approche s’appuie là aussi sur un modèle décentralisé au travers de la définition de domaines de données. Chaque domaine compte un « domain owner » chargé de la qualité et du catalogage des données, en partenariat avec d’autres propriétaires de son périmètre.

Ces fondations sont nécessaires, mais seuls les cas d’usages génèrent réellement de la valeur. La mise en production de multiples usages est en cours. La finalisation est annoncée au cours de cette année. Les applications développées visent ainsi à se doter d’une vision omnicanale. Egalement à réaliser du precision marketing (prédiction des comportements d’achat avant le séjour et sur les villages). Et à procéder au routage intelligent des appels.

Valorisation des données non structurées

A entendre Siddhartha Chatterjee, les centres d’appels constituent un important générateur de business. Ceux-ci représentent entre 30 et 35 % des ventes ! Ce canal est par conséquent stratégique sur le plan commercial et au niveau de la satisfaction client. Des projets Data & IA ciblent donc spécifiquement les collaborateurs des centres d’appels. Il s’agit, par exemple, de leur fournir une interface regroupant toutes les données disponibles sur le client, ainsi que d’autres sources utiles pour optimiser le taux de conversion et la satisfaction.

Les centres collectent par ailleurs des volumes importants de données non structurées : appels enregistrés, commentaires sur les réseaux sociaux, réclamations client… Soit autant de données qui peuvent encore être valorisées.

Acculturer, communiquer et former les métiers

Le succès d’un tel projet reposant sur l’adoption des technologies, Club Med a investi sur l’acculturation. A commencer par un fonctionnement en communautés, composées d’utilisateurs intéressés par les produits Data, en mesure d’agir comme ambassadeurs dans les domaines métiers.

Pour créer ces communautés et les alimenter, Club Med s’appuie sur Microsoft Teams, ainsi que sur l’outil collaboratif Meta Workplace. Des communications via des newsletters sont aussi réalisées pour partager des informations sur les actualités, l’avancement des projets, etc.

La promesse sera vérifiée à partir de 2023. Road 45 doit en effet se concrétiser par une « accélération business » et une appropriation au quotidien par les utilisateurs métiers. En outre, Club Med souhaite développer l’exploitation des données sur site, c’est-à-dire au sein de ses villages durant la consommation de la prestation. La firme pourra, pour cela, tirer profit de son application mobile et des écrans installés sur les espaces physiques. Quant à la digitalisation dans les villages, elle est prévue en 2024.