BenallaGate, l’analyse du EU DisinfoLab qui dérange

par | Août 14, 2018 | Data Intelligence, Expérience | 0 commentaires

L’affaire Benalla rebondit en Belgique. Le EU DisinfoLab a décortiqué l’hyperactivité sur les réseaux sociaux. Et ses conclusions dérangent. Jusqu’où, à l’heure du GDPR, peut-on informer ?

Le 18 juillet dernier, quand le journal Le Monde dévoile l’identité d’Alexandre Benalla, l’affaire connaît un retentissement considérable, aussi bien dans les travées politiques que sur les réseaux sociaux. Et de rebondir depuis la diffusion de l’analyse des l’hyperactivité sur les réseaux sociux  de EU DisinfoLab.

Doctorant à l’UCL, spécialiste de ces réseaux, Nicolas Vanderbiest découvre que, dans les deux semaines qui ont suivi les révélations du quotidien, une grande partie (47%) des tweets consacrés à l’affaire auraient été rédigés par une minorité (1%) des internautes investis sur la question. Et de poser alors la question sur le EU DisinfoLab : comment s’exerce cette hyperactivité ? S’agit-il de partages militants ou est-ce un gonflage numérique contaminé par de la désinformation ? Depuis, les attaques viennent de toutes parts…

Premier constat : entre le 19 juillet et le 3 août, plus de 4,5 millions de tweets en français ont été échangés sur ce sujet par plus de 247 701 auteurs différents. Ce volume est tout à fait exceptionnel : trois fois plus que BalanceTonPorc et deux fois plus que JeSuisCharlie. Un autre chiffre l’est aussi : 1% des acteurs (soit 3378 personnes en excluant les médias) ont publié 47% des contenus.

Parmi ces hyperactifs, on retrouve différents réseaux identifiés pendant la présidentielle française de 2017 : 27% font partie de l’écosystème qui relayait les médias Russia Today et Sputnik en février et mars 2017 (pendant la campagne présidentielle française de 2017 et avant la diffusion de la chaîne RT en France qui date de décembre 2017); 9,43 % faisaient partie des 840 comptes ayant partagé au moins trois désinformations durant la présidentielle qui ont été identifiées comme telles par Crosscheck, un projet de FirstDraft, organisme référent de fact-checking.

Pour EU DisinfoLab, ces comptes sont clairement militants et à intentions militantes. Cela se remarque d’ailleurs dans le pic des dates de création de leurs comptes qui correspond aux périodes d’élections présidentielles : 2012 et 2017. Qui plus est, 41,9% de ces comptes n’ont aucune information à propos de leur localisation. Et 92,5 % des comptes utilisent un pseudonyme pour communiquer. L’élément intéressant est le fait que la part de l’utilisation de pseudonyme diminue avec les acteurs qui partagent le plus de désinformation (Pierre François, Louis Dupont, etc.).

Base légale

Il n’en faut pas plus pour que le BenallaGate rebondisse: l’affaire aurait été en partie gonflée, voire instrumentalisée par certains. L’étude est aussitôt récupérée, mais détournée. Ce fichier, laisse-t-on entendre, aurait été utilisé à des fins de fichage politique. Aujourd’hui, l’ONG bruxelloise se défend : la publication des données brutes de l’étude a été réalisée afin de répondre aux nombreuses demandes publiques de transparence. Ces demandes ayant été satisfaites, elle a procédé aux diligences nécessaire auprès de Free (l’hébergeur de ces données) pour en obtenir la suppression.

«Si un grand nombre de personnes se sont senties fichées, l’étude publiée repose néanmoins sur une base légale, se défend EU DisinfoLab. Elle est fondée sur l’exercice du droit à la liberté d’information et du droit du public à l’information, ce qui constitue un intérêt légitime au regard du GDPR et ne nécessite donc pas de recueillir le consentement des personnes concernées.»

Et de poursuivre : «Notre étude s’inscrit aussi dans l’exception prévue par le GDPR selon laquelle il peut être fait exception à l’obligation d’informer les personnes concernées si cela est nécessaire pour concilier le droit à la protection des données et à la liberté d’expression et d’information.»

La CNIL instruira les plaintes

L’affaire de cet été restera un cas d’école. L’ambition était de comprendre, sur base d’éléments vérifiés, comment les rumeurs se propagent; comment celles-ci suscitent une véritable hyperactivité et voir si les comptes en question avaient déjà posté des désinformations par le passé… Visiblement, l’analyse a gêné. De nombreux internautes français mécontents de se voir «fichés» ont saisi la CNIL, la Commission française informatique et libertés, qui a déclaré qu’elle instruira les plaintes.

Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen ont à leur tour critiqué EU Disinfo Lab et Nicolas Vanderbiest. «Eh stupide barbouze ! Je ne suis pas un bot russe. C’est juste moi, Mélenchon, qui tweete contre toi ! Si t’as besoin de me ficher pour t’en rappeler, c’est que tu es encore plus bête que tu en as l’air», a ainsi tweeté le patron des Insoumis. Une réaction qui en dit long…

Summary
BenallaGate, l'analyse du EU DisinfoLab qui dérange
Article Name
BenallaGate, l'analyse du EU DisinfoLab qui dérange
Description
L'affaire Benalla rebondit en Belgique. Le EU DisinfoLab a décortiqué l'hyperactivité sur les réseaux sociaux. Et ses conclusions dérangent. Jusqu'où, à l'heure du GDPR, peut-on informer ?
Author
Publisher Name
Solutions Magazine
Publisher Logo