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Responsible Business, on y vient, on y vient…

Déc 15, 2023 | L'opinion de l'Expert | 0 commentaires

Etre « sustainable » ne suffira pas.  Pour Inès Godart, Head of Responsible Business, Fujitsu Belgium, il faut voir plus grand. Et viser le « Responsible Business ». La blockchain sera un excellent support.

« Aujourd’hui, presque toutes les organisations prétendent être sustainable, mais est-ce vrai, questionne Inès Godart, Head of Responsible Business, Fujitsu Belgium. Et dans quelle mesure êtes-vous convaincu, en tant qu’entreprise, que tous les partenaires et fournisseurs de votre chaîne d’approvisionnement tiennent leurs promesses ? »

Fin novembre 2023, le groupe belge Vandemoortele annonçait qu’il mettait temporairement un terme à sa collaboration avec un producteur d’huile de palme indonésien. L’enquête -parue dans le Tijd et l’Echo- a révélé que l’entreprise en question, First Resources, est impliquée dans une déforestation à grande échelle. Et pourtant, d’après les rapports de durabilité disponibles, il n’y a aucun problème. « Cela prouve à quel point il est encore difficile de distinguer le greenwashing des entreprises réellement soucieuses de la planète… Vandemoortele, pionnier dans le domaine de la durabilité dans l’industrie alimentaire, a peut-être collaboré sans le savoir pendant des années avec une entreprise qui est moins durable en coulisses qu’elle ne le prétend ! »

Lutter contre le greenwashing

Bel exemple de greenwashing non-intentionnel ! Ou comment véhiculer l’image illusoire de l’écoresponsabilité d’une entreprise. Une communication responsable ne signifie pas toujours que l’entreprise agit en conséquence. « La montée des pratiques d’écoblanchiment a accru le scepticisme des consommateurs, ce qui a malheureusement eu un impact négatif sur les véritables marques respectueuses de l’environnement et les efforts de sensibilisation du public », regrette Inès Godart.

A l’origine, le plus souvent, des lacunes au niveau de la traçabilité -partielle et partiale. Si la traçabilité permet de préserver la qualité des produits, d’améliorer l’efficacité des processus, de garantir la sécurité et de favoriser le développement durable, sa mise en place peut demander des efforts et du temps…

« Les organisations ont besoin d’une analyse transparente et approfondie des partenaires avec lesquels elles travaillent, poursuit Inès Godart. C’est là que la technologie blockchain peut jouer un rôle. In fine, c’est une affaire de data ! Dans une blockchain, elles sont cryptographiquement scellées afin que personne ne puisse les falsifier. Cela rend le passé immuable et traçable. Tout comme pour les transactions financières, la blockchain garantirait également la transparence dans un contexte de durabilité et peut donc lutter contre le greenwashing. »

Tout dans la blockchain !

La technologie blockchain peut offrir plusieurs avantages aux chaînes d’approvisionnement, notamment en termes de durabilité. En conservant un registre de toutes les ressources utilisées dans le processus de production, les entreprises peuvent limiter leur utilisation et limiter la quantité d’émissions produites. De plus, la blockchain peut être utilisée pour vérifier l’origine des produits, contribuant ainsi à réduire le risque de pratiques illégales ou contraires à l’éthique.

A la clé, aussi, des gains de temps et d’argent consacrés à la saisie et au suivi manuels des données. Indirectement, la blockchain permet de rationaliser la communication entre les entreprises et les fournisseurs, au bénéfice d’une meilleure collaboration et un flux global d’informations plus limpide.

Enfin, en stockant les données sur un grand livre distribué, la blockchain empêche la falsification des données et l’accès non autorisé. « Tout ce qui se passe sur la chaîne d’approvisionnement est inscrit dans la blockchain, que ce soit une commande ou la date de début d’activité, illustre Inès Godart.  Et plus il y a de données, plus il est possible pour la plateforme de détecter les incohérences ou les erreurs, comme, par exemple, le poids à l’entrée d’un container et celui à la sortie. »

CSRD et DPP… changement de donne

A la lumière des concepts étroitement liés de blockchain pour le développement durable et de greenwashing, il est crucial pour les entreprises d’aborder le paysage de manière réfléchie. La mésaventure de Vandemoortele prouve qu’il faut prendre avec précaution certains rapports qui ne sont précédés d’aucun contrôle ou audit externe. « Espérons que le CSRD puisse placer la barre plus haut en matière de reporting sur le développement durable à travers le monde, avance Inès Godart. Et ainsi donner le ton non seulement pour plus de durabilité, mais surtout pour une forme de durabilité plus transparente et honnête. »

La CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) de l’Union européenne arrive. Elle entrera progressivement en application à compter du 1er janvier 2024. Les premières sociétés devront appliquer les nouvelles règles pour la première fois au cours de l’exercice 2024, pour un rapport publié en 2025. « Le déploiement sera progressif entre 2024 et 2028, en commençant par les grandes sociétés d’intérêt public cotées sur un marché réglementé européen. » 

Batteries et textile, premiers secteurs concernés par le DPP

Attendu, aussi, le DPP (Digital Product Passport). À l’instar du passeport pour les voyages, le passeport numérique des produits -attendu pour 2026- est un document qui devra obligatoirement accompagner un produit tout au long de son cycle de vie. Il regroupera diverses données, allant de l’approvisionnement et l’extraction des matériaux nécessaires à la fabrication jusqu’au recyclage du produit en fin de vie. Pratiquement, il sera apposé à chaque produit sous la forme d’une puce NFC, d’un QR code ou d’une étiquette RFID.

Dans les premiers temps de l’implémentation du DPP, nombreux seront les fabricants et les marques qui devront repenser entièrement leurs modes opératoires et le choix de leurs partenaires en affaires. Mais une fois en place, le DPP fournira aux entreprises des informations précieuses sur leur empreinte environnementale. Il leur permettra d’atteindre plus rapidement leurs objectifs de développement durable, mais aussi de vendre plus cher leurs produits fabriqués de manière responsable. Les batteries et le textile seront les premières catégories de produits concernés.

 « Responsible business »… le pouvoir change de camp

Si ces étapes sont nécessaires, Inès Godart propose de voir plus loin que la notion de « sustainability ». Et de considérer plutôt le « responsible business » au champ d’action plus étendu : assumer la responsabilité envers les personnes et les problèmes environnementaux ainsi que la responsabilité de réaliser des bénéfices. A l’entendre, l’adoption urgente d’une entreprise responsable est désormais essentielle.

« Le pouvoir change de camp. Les marques, aujourd’hui, ne sont plus le domaine exclusif des entreprises qui les ont façonnées, développées et monétisées. Les consommateurs ont désormais la main. Les nouvelles technologies leur ont donné le pouvoir de défendre leurs opinions à grande échelle. Elles leur ont aussi donné la possibilité d’évaluer le discours des marques, leurs actes et leurs engagements. La marque est aujourd’hui devenue un bien commun… Peut-être qu’en comprenant que la triple responsabilité -les personnes, la planète et le profit- est une responsabilité et non un choix, la décision pourrait être plus facile à prendre… »