Les salariés en poste ont tendance à sous-estimer l’impact de l’IA sur leur carrière

Alors que 46 % dirigeants reconnaissent avoir réduit leurs effectifs à cause de l’IA, seulement 12 % des salariés licenciés en ont conscience. Ce décalage de 34 points ouvre une brèche inquiétante dans la compréhension des mutations du travail.

Beaucoup de salariés ignorent que leur poste a été supprimé pour des raisons technologiques. Or, cette méconnaissance n’est pas sans effet : ceux dont le licenciement est lié à l’IA mettent plus de temps à retrouver un emploi. Telle est la principale analyse de l’étude internationale « The Reinvention Imperative » menée par le cabinet de recrutement LHH, filiale du groupe Adecco

On vit une transformation profonde, mais, pour beaucoup, elle est invisible. Parmi ceux dont le poste a été supprimé pour des raisons technologiques, seulement 36,9 % décrochent un nouveau poste en trois mois, contre 46,2 % pour les autres. Ils sont également deux fois plus nombreux à traverser une transition professionnelle dépassant les douze mois.

L’expertise technologique ne protège plus

Ironie du sort, les secteurs les plus touchés par les licenciements liés à l’IA sont ceux qui sont à la pointe de l’innovation. Les logiciels informatiques arrivent en tête avec 23,3 % des licenciements attribués à l’IA, suivis par les services aux consommateurs (22,9 %) et le matériel informatique (20,2 %). À l’inverse, le secteur de l’énergie et de l’environnement n’est concerné qu’à hauteur de 2,5 %. Preuve que l’expertise technique ne protège plus de l’obsolescence des compétences.

L’étude montre également que les salariés sont souvent livrés à eux-mêmes. Plus de 70 % des candidats se forment seuls à l’IA, tandis que seulement 10,4 % bénéficient d’un accompagnement de leur employeur. Pourtant, cet investissement personnel porte ses fruits : 86,7 % des personnes formées utilisent l’IA dans leur recherche d’emploi, contre seulement la moitié chez les non-formés.

Réinvention professionnelle

Si près de 46 % des candidats redoutent que l’IA supprime des emplois, une part croissante (40,6 %) exprime de l’incertitude plutôt que de la résignation. Un signe, peut-être, d’une familiarisation grandissante avec ces technologies.

Quoi qu’il en soit, la reconversion s’impose comme une nécessité : 58 % des personnes en transition changent complètement de métier, alors qu’elles étaient 74 % à chercher initialement un poste similaire. La carrière ne se résume plus à un changement de poste, mais à une réinvention professionnelle.