L’usage de l’IA pose la question de la création. Quid de la vision de son auteur ?

« Avatar. De feu et de cendres », qui vient de sortir en salle, est vendu « 100% sans IA ». Un label de qualité ?

« L’IA générative peut inventer un personnage. Inventer un acteur, aussi. Et donc inventer une performance à partir de zéro avec un texte prompt. Pour moi, c’est non. C’est exactement ce que je ne fais pas ! »

Avatar, le retour. Avec ce troisième opus, James Cameron prolonge les aventures des Na’vi, ces créatures menacées par des Terriens colonisateurs. Un blockbuster aussi époustouflant sur la forme que sur le fond, qui fait écho à l’histoire des peuples opprimés. Bien. Pour la critique, « Avatar. De feu et de cendres » se révèle plus ardent et belliqueux que les deux précédents. Et s’attache à repousser les limites du blockbuster. Le cinéaste canadien embrase son univers et embarque le spectateur dans un spectacle total.

Un feu d’artifice d’action et d’émotion, mais sans IA, a insisté le réalisateur lors de la présentation du film. Pour ainsi dire une provocation dans une industrie cinématographique qui y recourt pourtant de plus en plus. Selon une étude de l’Animation Guild, le syndicat américain des animateurs, 75% des studios de cinéma d’animation aux États-Unis utilisent déjà des outils d’IA générative dans leur processus créatif.

Fait par des humaines pour des humains !

« Tout est le fruit du travail de nos équipes ; tout est humain ! » défend, solennel, James Cameron. En promotion pour son film, il le martèle : il n’utilisera pas l’IA générative, tout l’inverse de ce qu’il propose, lui. « Ça ne m’intéresse pas. Je ne pense pas que ce soit une manière de faire des films. Si vous prenez tout ce que tout le monde a déjà fait, et que vous mettez ça dans un mixeur pour obtenir une image nouvelle, inédite, je ne vois pas comment ça pourrait échapper à la médiocrité ! »

James Cameron n’est pas le seul à vendre une œuvre garantie sans IA générative. Au sujet de son dernier film fantastique paru sur Netflix, « Frankenstein », Guillermo del Torro défendait un film « fait par les humains, pour les humains » aux Gothams Film Awards. Un discours joliment ponctué d’un « Fuck AI » par le réalisateur oscarisé.

De fait, l’IA pose la question de la création.  Quid de la vision de son auteur ? Pendant la promotion de son album « Lux », sorti en novembre 2025, la chanteuse espagnole Rosalia a, à de nombreuses reprises, répété avoir avoir refusé tout usage de l’IA. « Toute la musique est à 100% faite par l’humain ! »

Le label « Fabrication humaine »

Bientôt un label humain ? La question mérite d’être posée. Selon la plate-forme de streaming musical Deezer, 97% de ses auditeurs ne parviennent pas à faire la différence entre les musiques générées par IA ou créées par des humains. Elle est aujourd’hui la seule à le notifier systématiquement.

« Remettons l’humain au cœur de l’équation », suggère une association française d’artistes, lecteurs, auditeurs, spectateurs, mais aussi experts en IA, éditeurs, producteurs, galeristes, libraires et journalistes concernés par l’impact actuel et potentiel de l’IA dans la société. Ils sont à l’origine du label « Fabrication humaine ». Mission : alerter sur les effets de l’IA dans le domaine culturel. « ll sera de plus en plus difficile de reconnaître une œuvre artistique d’un produit généré par l’IA. Le public doit pouvoir être informé des conditions de réalisation d’une œuvre et si son auteur a utilisé ou non l’IA dans son processus créatif. »

« Consommer » un bien culturel en connaissance de cause

Il s’agit d’abord et avant tout d’un acte déclaratif n’engageant que celui qui décide d’apposer le label sur tout ou partie de ses œuvres, pour revendiquer l’origine humaine de sa création. Celui-ci pourrait avoir recours à l’IA comme « outil », mais il ne pourrait s’agir que d’une utilisation purement technique excluant tout usage de l’IA dans l’élaboration créative et esthétique de son œuvre.

En résumé, la limite est l’utilisation du « prompt » dans l’acte de création. Ce label ne vise pas à stigmatiser le recours à l’IA, mais permettre à chacun de « consommer » un bien culturel en connaissance de cause.

Le label « Fabrication humaine » a été utilisé pour la première fois dans le domaine de la bande dessinée sur l’œuvre « Bunkerville ».