Les humanoïdes semi-autonomes de Beeple brouillent les frontières entre sculpture, surveillance et portrait vivant

Bezos, Musk, Zuckerberg, Mais aussi Picasso ou Warhol. Tous mis en scène sous forme de robots chiens. L’exposition « Regular Animals » provoque la tech. L’artiste dénonce la manière dont les algorithmes contrôlés par les géants technologiques façonnent notre vision du monde.

« Ce projet réinterprète l’héritage du portrait pop, de la sculpture et de l’art génératif à travers le prisme de la tech. Chaque humanoïde robotique n’est pas un simple objet statique, mais une toile numérique fluide. A travers celle-ci,  nous percevons le monde – ses souvenirs capturés, réimaginés et préservés sur la blockchain… Soit un ensemble de données futur sur lequel l’IA sera entraînée. »

L’artiste numérique Mike Winkelmann -plus connu sous le nom de Beeple- fait actuellement sensation à Beeple

avec son œuvre « Regular Animals ». Une drôle d’exposition dans la plus grande foire d’art contemporain des Etats-Unis où chaque œuvre est vendue 100.000 USD.

« Si aujourd’hui nous commandons et contrôlons ces compagnons mécaniques, l’évolution collective de nos identités numériques et physiques -conjuguée aux progrès de la robotique et de l’IA- laisse entrevoir un avenir où les rôles pourraient s’inverser, a expliqué l’artiste. Cette œuvre explore la tension entre contrôle et autonomie, permanence et transformation. Elle nous invite à repenser les frontières de l’art, de l’identité et la nature même de notre relation à la technologie. »

À Art Basel Miami Beach -où le spectacle grandiose se mêle de plus en plus à l’expérimentation des nouveaux médias- « Regular Animals » s’est distinguée par sa capacité à transformer les spectateurs, d’observateurs passifs, en acteurs d’une évolution partagée de la perception et de la mémoire.

Espace perceptif

Mais « Regular Animals » dépasse le simple cadre de la sculpture. Chaque figure est équipée d’un système de détection et de mobilité avancé lui permettant de se déplacer de manière autonome. Un capteur LiDAR 4D Unitree L1 offre un champ de vision hémisphérique de 360° x 90°. Ce qui permet la cartographie 3D en temps réel, la prédiction de trajectoire, le suivi latéral et une perception autonome de l’environnement. Les visiteurs ne se contentent pas de contempler l’œuvre : ils partagent un espace perceptif commun avec elle.

Douze membres à servomoteurs permettent aux corps de se déplacer, de pivoter et de se rééquilibrer avec une précision stabilisée par une centrale inertielle. Leur agilité, atteignant jusqu’à cinq mètres par seconde en laboratoire, contraste fortement avec la rigidité des gestes des répliques figuratives traditionnelles.

Artefacts physiques

A entendre l’artiste, « les figures ne posent pas ; elles agissent. »

Chaque être robotique intègre également un système de sortie qui enrichit son récit. Soit un écran dorsal affichant des informations dynamiques, huit indicateurs supplémentaires qui pulsent en fonction de l’activité, et une imprimante thermique à sublimation (Canon Selphy CP1500) capable de produire des impressions de 10 × 15 cm à 300 × 300 dpi. Ces impressions -traces d’identité, « souvenirs » d’observation, fragments d’expérience vécue- deviennent des artefacts physiques témoignant de l’existence du robot.