Grippe, virus informatiques, rumeurs, opinions, pièces ou billets se transmettent d’une personne à l’autre au gré des rencontres successives, réelles ou virtuelles. Qui est atteint ? A quelle vitesse ? Questions posées par les médecins, informaticiens, sociologues ou économistes. Pour les mathématiciens, c’est toujours la même question, car c’est toujours la même équation à résoudre, celle de la diffusion sur un réseau.

Jean-Charles Delvenne, professeur à l’Ecole Polytechnique de Louvain, analyse cette diffusion d’informations afin de déterminer quels sont les éléments qui accélèrent ces transmissions. Le but ? Comprendre le processus afin d’enrayer la transmission de virus ou rumeurs, dès leur origine, le plus rapidement possible. Ses recherches viennent d’être publiées dans la revue scientifique Nature Communications.

Pour mener sa recherche à bien, Jean-Charles Delvenne a pris en compte deux éléments essentiels :

– le réseau social d’une part : le long des liens qui nous unissent, de proche en proche, le virus va, vole et nous mange. Une classe dans l’école, une école dans la ville, une ville dans le pays, un pays dans le monde : autant de structures sociales hiérarchiques plus ou moins étroitement connectées traversées par la propagation comme par à-coups ;

– la dynamique sociale des individus : téléphonez-vous à votre maman une fois par an ? Par semaine ? Par jour ? Toute rumeur propagée par vous le sera d’autant plus vite. La fréquence moyenne des contacts n’est pas tout : bien des gens se plaisent à être imprévisibles, aujourd’hui sociables et demain reclus. Un tel comportement nuit fâcheusement à une diffusion efficace des ragots.

Jean-Charles Delvenne (Ecole Polytechnique de Louvain à l’UCL), en collaboration avec Luis E.C. Rocha (Karolinska Institutet de Stockholm et chercheur FNRS à Namur) et Renaud Lambiotte (Centre naXys de l’UNamur), a trouvé la recette qui permet de combiner ces deux ingrédients pour prédire la dynamique de diffusion à travers le réseau social, là où ces deux ingrédients n’avaient été auparavant considérés que séparément.

Le résultat de l’étude est surprenant : bien souvent un ingrédient écrase l’autre. Dans certaines situations, c’est la structure hiérarchique du réseau qui compte, sa façon de se diviser en groupes plus ou moins connectés; dans d’autres, c’est la dynamique précise des individus, leur art d’être imprévisibles.

Des situations de terrain confirment ce théorème. Par exemple, sur un réseau de contacts sexuels au Brésil c’est la structure en villes et en quartiers qu’il faut connaître pour déterminer comment se propagent les maladies vénériennes. Par contre, les maladies nosocomiales, qui s’attrapent dans un milieu hospitalier, par ex. français, semblent régulées par les horaires de contacts entre patients et personnel.

C’est une conclusion importante pour celles et ceux qui veulent prévenir la progression, disons de la grippe ou d’Ebola. Pour prévenir il faut prédire. Et comment prédire avec précision ? Collecter et analyser la structure sociale d’une population, et aussi les horaires précis de ces contacts, est une tâche impossible, même avec les big data à la rescousse.

On est bien forcé de «deviner» l’avenir avec des informations limitées sur le présent et le passé. Les travaux décrits permettent de garantir que la prédiction sera de qualité tout de même. A chaque situation sa solution. Ici, il suffira de mesurer le nombre d’échanges entre villes; là, il faut descendre au niveau des individus. Ailleurs, il est surtout crucial de connaître la temporalité, donc la fréquence et la régularité des contacts.

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Avancée significative sur l’analyse des transmissions d’informations
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Jean-Charles Delvenne analyse les éléments qui accélèrent les transmissions d'informations
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